03/07/2022

Les descendants - Chapitre 5

 



    Toute l’école ne parlait plus que de cela. Comment était-il possible d’entrer à Poudlard sans effectuer les deux premières années nécessaires à l’apprentissage des bases de la magie ? Comment se faisait-il que personne n’est jamais entendu parler de cette fille ? Les rumeurs dans l’école de sorcellerie allaient bon train. Cependant, Emily s’en était plutôt bien sortir auprès des autres élèves de sa maison lorsqu’ils eurent enfin pu lui poser toutes les questions qui leur brulaient les lèvres. Une fois encore elle ne mentit pas totalement. Son existence était passée inaperçue tout simplement parce qu’elle ne se servait pas de la magie, ignorant tout de leur monde et étant orpheline, elle avait tout bonnement caché sa différence. Elle évita tant bien que mal les questions où elle aurait pu se perdre et ils avaient fini par la laisser tranquille, voyant qu’ils n’obtiendraient pas mieux d’elle, préférant tirer leurs propres conclusions qui étaient, bien évidemment, davantage croustillantes. Le lendemain, elle se réveilla dans cette nouvelle chambre qu’elle partageait avec les autres filles de Poufsouffle. La pièce était drapée des couleurs de leur maison, noir et jaune. Le contraste était assez brutal au réveil, mais elle était certaine qu’elle finirait par s’y habituer. Emily avait revêtu sa robe de sorcière sur laquelle se trouvait désormais le blason de sa maison : un mignon petit blaireau sur fond jaune. Elle le regarda avec mélancolie, repensant au Lion de Gryffondor, mais repoussa rapidement cette idée, tentant de se conforter dans son choix. En relevant la tête elle ne manqua pas les regards en coin qu’on lui lançait. À cela aussi, elle allait devoir s’y faire, se disait-elle, consciente que ça allait être son lot quotidien pendant encore un bon moment. Les bonnes résolutions qu’elle avait promis à Nathanaël de tenir lui semblèrent déjà un échec cuisant, et ce sans même avoir fait quoi que ce soit de sa propre initiative pour manquer à sa parole. Sa nouvelle amie qui était installée sur le lit en face du sien, jambes croisées, la tira de ses sombres pensées :

    – Alors cette première nuit ? Ça doit te faire bizarre tout ça.

    Emily se tourna vers Lydi avec un large sourire. La jeune fille au physique enfantin était très certainement l’un des rares points positifs depuis son arrivée à Poudlard. Saphir, le premier d’entre eux, sauta sur le lit de son amie pour s’installer en boule dans le creux que formait ses petites jambes.

    – En effet, j’ai l’impression que je ne cesserai jamais d’être surprise. J’aurais juste passé une meilleure nuit si je n’avais pas eu peur qu’on essaye de m’égorger dans mon sommeil, ajouta-t-elle avec une grimace légèrement exagérée qui arracha un petit rire à Lydi.

    – Ça leur passera. Je pense qu’elles trouveront vite un sujet plus intéressant.

    Lydi fit signe à Emily de s’assoir sur son lit pour qu’elle puisse lui chuchoter :

    – J’ai entendu deux filles de troisième année dire que leur but ultime était de se trouver un petit copain. Beurk !

    Emily ne put que rire devant la réaction de son amie. Elle n’avait elle-même jamais eu de petit ami et ne s’était jamais vraiment demandée si cela pourrait lui plaire, trop occupée à ne pas s’attirer trop d’ennuis et à se retenir de frapper sur certains garçons qui étaient odieux avec elle. Sous sa masse de cheveux roux et miel, se trouvaient en effet quelques toutes petites taches de rousseur parsemées juste en dessous de ses yeux verts, ce qui lui avaient valu pas mal de moqueries alors qu’elles étaient pourtant très discrètes, ajoutant même un petit charme à son beau visage. Elle repoussa ces mauvais souvenirs au loin et finit par répondre :

    – Eh bien ! Voilà de belles ambitions ! 

    Les deux jeunes filles abandonnèrent Saphir sur le lit et quittèrent le dortoir pour se rendre à la salle commune de leur maison. De nombreux élèves s’y trouvaient encore, dont le garçon à la peau mate qui avait tant agacée Emily la veille au soir et dont elle avait appris le nom au cours de la soirée : Jamie Connors.

   – J’espère que tu as sauté de classe parce que tu es surdouée, lui dit-il d’un air hautain. On ne permettra pas que tu fasses baisser le niveau de Poufsouffle juste parce que tu es le nouveau chouchou de McGonagall. Et puis, il va falloir que tu bosses pour deux vu que ta copine nous a rejoint elle aussi, dit-il en regardant Lydi avec dédain.

    – J’espère que tu es du genre exemplaire et premier de la classe pour nous faire ce genre de réflexion, lui lança Emy.

    – Ça ne doit pas être bien compliqué d’être meilleur que vous.

    Ce dernier ne laissa pas Emy rétorquer davantage et quitta la salle commune avec quelques élèves.

    – Dommage qu’on ne puisse pas avoir cours ensemble, dit Lydi. Il semblerait qu’ils ne m’apprécient pas davantage.

    – Comme quoi, si une qualité n’est pas exclusive à une maison, la méchanceté n’est pas propre à Serpentard, dit-elle à Lydi.

    Cette dernière ne répondit rien et Emily réalisa que la jeune fille, jusqu’à présent enjouée, affichait un petit visage triste et inquiet.

    – Ne t’inquiète pas, on va leur montrer qu’on est aussi bon qu’eux. Et surtout, qu’on n’a pas besoin de leur approbation.

    La jeune fille forte et indépendante qu’était Emily Jonson avant de voir son monde bouleversé reprenait du poil de la bête. Voir son amie ainsi traitée et touchée avait réveillé en elle son instinct de battante. Emily n’avait jamais eu de frère et sœur, mais elle avait vu en Lydi quelque chose qui s’en rapprochait dès son entrée dans son wagon dans le Poudlard Express. Elle la défendrait coûte que coûte et ferait regretter à ce Connors de les avoir ainsi rabaissés.

    – On ferait mieux de se dépêcher, il vaudrait mieux éviter d’être en retard.

    Emily suivit son amie qui semblait déjà subir la pression des autres élèves. Elle tenta pendant le petit déjeuner de lui rendre le sourire, en vain. Elle se promit alors de ne plus laisser personne s’en prendre à elle de cette façon.

 

*

 

    Emily trouva tant bien que mal la salle où se déroulerait son premier cours. Le château, en plus d’être gigantesque, était un véritable labyrinthe. Elle arriva dans la salle alors que tous étaient déjà installés. Fort heureusement pour elle, le cours ne semblait néanmoins pas eavoir encore commencé. Lorsqu’elle entra, le professeur était de dos en train d’écrire son nom sur le tableau à craie. Elle tenta de s’installer discrètement à la seule table restée vide, sous le regard de tous ses camarades. Jamie qui était une table plus en avant dans la rangée de gauche se pencha pour lui dire :

    – Peut-être que j’aurais dû te prévenir d’arriver à l’heure, la surdouée ?

    Quelques élèves se mirent à rire et Emily lui lança :

    – La ferme Connors, j’ai déjà un tuteur.

    Les élèves rirent de plus bels, ruinant totalement les maigres efforts d’Emily pour se faire discrète.

    – Miss Jonson, veuillez surveillez votre langage je vous prie.

    Le professeur se retourna enfin et posa son regard bleu pur sur la jeune fille. Celle-ci retint un hoquet de surprise avant de lui faire un petit sourire forcé et de s’excuser pour sa vulgarité.

    – Quant à vous monsieur Connors, il ne me semble pas avoir laissé sous-entendre un quelconque besoin d’un assistant pour réprimander les élèves.

    Connors se retourna droit sur sa chaise, les dents serrés. Certains élèvent pouffèrent tandis que les autres se demandèrent comment il connaissait leurs noms. Le professeur de défense contre les forces du mal avait été aux abonnés absents à la cérémonie de rentrée et, comme chaque année, ce dernier était nouveau lui aussi. Emily ne le lâchait pas du regard, se demandant comment allait se dérouler l’année avec ce professeur.

    – Très bien, pour ceux qui ne l’auraient pas compris, je suis le professeur Stevenson, dit-il en indiquant son nom écrit au tableau. Comme vous le savez, je serais votre professeur de défense contre les forces du mal cette année et, si je survis, peut-être l’année prochaine également.

    Tous sauf Emily rirent à l’allusion faite sur la malédiction qui semblait s’abattre sur les professeurs ayant pris ce poste. Tous n’étaient pas mort, mais pour une raison ou pour une autre, ils n’exerçaient jamais plus d’une année à Poudlard.

    – Bien ! dit-il en s’asseyant sur son bureau. Pour commencer ce cours, j’aimerais connaitre votre définition sur ce qu’est le mal. Oui je sais, vous êtes déjà en troisième année mais, justement, il me semble qu’apprendre bêtement à se défendre n’a pas d’intérêt si l’on ne sait pas contre quoi on est sensé se défendre. Alors ? Une idée ?

    Emily sourit. Elle aimait beaucoup cette entrée en matière. Poudlard allait définitivement être moins barbant que les écoles des…moldus, comme ils disaient.

    Les élèves se regardèrent tour à tour jusqu’à ce qu’un élève ne lève la main. Le professeur lui donna la parole d’un signe de tête. Emily suivit son regard et reconnut l’élève comme étant le jeune homme aux yeux vert qu’elle avait croisée – ou plutôt heurtée – à la Ménagerie magique.

    – Le mal est un acte provoquant la douleur, la peine, l’horreur chez autrui.

   – Voilà qui est simple, concis et efficace. Quelqu’un désirerait-il compléter ? Oui Miss Granger ? Granger ou Weasley ?

    – Qu’importe monsieur.

    – D’accord. Nous vous écoutons.

   – Le mal n’est pas fait uniquement aux humains, il peut être fait envers toutes les créatures qui existent en ce monde. Par exemple, pendant des siècles les elfes étaient traités comme des esclaves par des familles de sorciers, et cela continu toujours aujourd’hui dans les plus anciennes familles.

    Le professeur sourit.

    – Oui, nous savons tous la noble cause soutenue par votre mère, Miss Granger. Quoi d’autre ?

   – Un acte mauvais est un acte allant à l’encontre de la morale, dit une élève portant le blason de Serdaigle.

    – Hum…voilà qui est très intéressant et très philosophique Miss Bennett. Mais pour cela il faudrait une définition de ce qu’est la morale.

        – Ce qui serait très complexe puisque nous n’avons pas tous la même définition de ce terme, ajouta la jeune fille se nommant vraisemblablement Miss Granger-Weasley.

    – En effet et cela pourrait être l’objet d’un autre cours. Mais restons sur la question du mal et passons aux exemples voulez-vous ? D’actes, d’êtres qui selon vous représentent le mal.

    – Voldemort, dit Connors, arrachant de petits rires qu’Emily ne comprenait pas, à certains élèves de la classe.

    – Oui, en effet monsieur Connors, il serait difficile de réfuter cet exemple. Quelqu’un d’autre ?

    Les idées fusèrent alors. La classe était animée et Emily écoutait attentivement, spectatrice. Bien qu’ayant lu les livres sur le monde de la magie elle n’avait pas toujours retenue les noms et termes employés et préférait éviter de dire des âneries.

    – Il n’y a pas que les sorciers, ajouta Connors. Certaines créatures en font également parties, comme les loups-garous.

    Emily haussa un sourcil.

    – Voilà qui est intéressant monsieur Connors. Le sujet des loups-garous sera effectivement traité cette année mais pouvez-vous développer ?

    – Ce sont des créatures mi humaine-mi bête qui se transforment les soirs de pleine lune et qui deviennent tellement incontrôlables qu’elles peuvent blesser voire tuer des gens.

    Emily ne put s’empêcher de laisser échapper un rictus sonore.

    – Vous n’êtes pas d’accord Miss Jonson ?

  Tous les regards se tournèrent vers elle et bien qu’elle se maudît d’avoir laissé son outrance transparaitre, elle n’eut d’autre choix que de défendre son idée.

   – Pas tout à fait professeur. Il me semble que vous demandiez la définition du mal, pas de « dangereux ».

    – Parce que tuer des gens ce n’est pas mal ? demanda Connors plus fort que nécessaire.

    – Si, mais si l'acte lui-même est mal, ça ne signifie pas que les loups-garous représentent le mal. Il y a une différence entre tuer quelqu’un sciemment et le faire sans savoir ce que l’on fait.

    Emily défendait sa vision des choses sans savoir qu’une personne dans la salle écoutait cet échange avec un intérêt tout particulier. Les loups-garous, ils les haïssaient par-dessus tout. Comment pouvait-elle défendre ces animaux ? Jamie avait raison. Ce ne sont que des bêtes. L’envie de la remettre à sa place et la colère qui montait en lui, lui fit écraser son encrier dans sa main. Fort heureusement, toute la classe étant absorbée par la confrontation entre Jamie et la nouvelle, personne ne remarqua l’incident et il tenta discrètement d’enrouler l’objet désormais brisé dans son écharpe. Tant pis pour la tâche.

    – Le résultat est le même, rétorqua Connors.

    – Pas les intentions, répondit Emy.

    – Calmons-nous je vous prie, reprit le professeur. Pourriez-vous développer davantage Miss Jonson ?

    – Je pense que le mal ne peut être reconnu comme tel que lorsqu’il est intentionnel. Les loups-garous sont comme MONSIEUR CONNORS l’a si bien dit, incontrôlables. Eux-mêmes ne savent pas ce qu’ils font. Les humains par contre, lorsqu’ils se font la guerre, savent très bien ce qu’ils font. Lorsqu’un humain en tue un autre, il sait ce qu’il fait, pas le loup-garou. Je pense qu’il serait temps d’apprendre à se mettre à la place des autres. L’être humain qui tue volontairement pour faire le mal n’a pas de regret. Le loup-garou lorsqu’il reprend sa forme humaine à l’aube, à quoi pense-t-il ?

    – Il doit se voir comme un monstre, répondit Connors, et c’est ce qu’il est.

    – Tu es immonde ! s’emporta Emily devant tant d’intolérance.

    – Très bien ! Très bien ! intervint le professeur qui voulait temporiser. Je vois que l’heure de cours est terminée et bien que le chapitre des loups-garous ne soit pas prévu avant le second semestre, je pense qu’il serait intéressant de bousculer un peu le programme. Vous me ferez tous deux rouleaux de parchemin sur le sujet que nous avons traité ce matin et ce, centré sur le cas des loups-garous. Avant que vous ne partiez et puisque le cours de ce matin était une libre discussion qui ne supposait pas de bonnes ou de mauvaises réponses, toutes celles et ceux qui ont participé font gagner dix points à leur maison respective. Je vous remercie pour l’intérêt dont vous avez fait preuve et j’espère que vous continuerez ainsi tout au long de l’année. Bonne journée à tous !

    – Bonne journée professeur ! répondirent les élèves en cœur.

    Tous sortirent de la classe, excités comme des puces. Ce premier cours de l’année avait été des plus passionnant ! À tel point que les propos d’Emily étaient passés aux seconds plans, ce qui ne fut pas pour lui déplaire. Il lui était suffisant d’avoir Connors sur le dos sans que tout le reste de la classe s’y mettent. Emily chercha le jeune homme de Serpentard du regard mais il semblait déjà être parti. Elle en fut déçue. Il lui était venu l’idée folle de reprendre leur conversation là où ils l’avaient laissé. Son intervention en classe l’avait laissé penser que les Serpentard n’étaient peut-être pas tous des idiots. Mais elle ne pourrait pas le vérifier aujourd’hui.

    – Hey ! Emily !

    Deux élèves de Gryffondor l’avaient interpellé et elle redouta ce qui allait suivre.

    – Super ta participation en classe ! Tu aurais dû être à Gryffondor ! dit le garçon aux cheveux châtain clair.

    – Ce Connors est vraiment un idiot, ajouta la fille que le professeur avait appelé Miss Granger en cours un peu plus tôt.

    Emily les regardait quelque peu étonnée. Elle ne s’attendait pas à ce que l’on vienne la féliciter pour quoi que ce soit de par son statut de « chouchou » que lui avait collé certains élèves.

    – Oh ! On ne s’est pas présenté, reprit le premier, James Potter. Et voici Rose Granger-Weasley.

   – Emily Jonson, mais ça tout le monde le sait, dit-elle en se présentant à son tour avec une petite grimace.

    – Même sans la cérémonie tu ne serais pas passée longtemps inaperçue avec des opinions telles que les tiennes, lui répondit Rose, opinions que je partage à cent pour cent.

    – Merci, dit Emily avant d’être bousculée par un garçon à la coupe militaire.

    – Hey ! cria-t-elle à son encontre.

    Le jeune homme se retourna vers le petit groupe en leur lançant un regard assassin. Il s’attarda quelques instants sur James avant d’afficher un air surpris, effrayé, puis écœuré envers Emily et de repartir la mâchoire crispée. À cet instant Emily eut une sensation étrange. Il avait quelque chose de différent. Quelque chose qui la rendit subitement nerveuse. Elle garda pour elle l’impression étrange qu’elle venait de ressentir. Si elle avait raison, elle ferait mieux de ne pas trop se frotter à cet élève qui pourrait bien lui valoir des ennuis.

    – Apparemment mon opinion n’est pas partagée de tout le monde, dit finalement Emy en le regardant partir. Qui est-ce ?

    – Alexander Bolivard, répondit James, il est aussi à Gryffondor. N’y vois rien de personnel. Son père est un ancien auror. J’ai entendu mon père et oncle Ron parler un soir en disant qu’il ne pourrait plus tenir ce poste, ajouta-t-il à voix basse. Je n’ai pas tout entendu mais, depuis notre arrivé à Poudlard, il semble nous en vouloir Rose et moi.

    La jeune élève de Poufsouffle toujours inquiétée de la sensation qu’elle avait ressenti un peu plus tôt n’ajouta rien, pensive. Le couloir était désormais vide, les autres élèves s’étant déjà mis en route pour l’heure qui suivait.

    – On ferait mieux de se dépêcher si on ne veut pas arriver en retard en classe, dit Rose qui détestait cela.

    Le petit groupe se dirigea donc vers la salle de cours sans rien ajouter d’autres que des banalités. Emily toujours dans ses pensées, commença à se demander si elle ne devrait pas prendre ses distances avec les Gryffondor. Elle avait un mauvais pressentiment concernant Alexander, et elle n’oubliait pas qu’elle avait ses propres secrets à garder…secret. Malgré le fait que Nathanaël l’avait invité à essayer de se faire des amis, le regard que lui avait lancé le jeune Gryffondor l’inquiétait. Elle espérait qu’elle n’était pas déjà percée à jour, ayant déjà du mal à faire accepter sa présence en troisième année, chose qui n’allait pas aller en s’arrangeant puisque le prochain cours était celui de sortilège, celui qu’Emily craignait le plus, n’ayant fait aucun progrès concernant l’utilisation de sa baguette magique.




Chapitre 6 (à venir)






12/06/2022

Les descendants - Chapitre 4

 



    Le train était arrivé en début de soirée en gare. Emily et Lydi avaient enfilé leur robe de sorcière tandis que Saphir était retourné non sans difficulté dans sa cage de transport. Emily savait qu’elle allait devoir se séparer de son nouveau compagnon jusqu’à la fin de la soirée et, laisser ce petit animal lui fendait le cœur. Sous ses airs de fille indépendante et forte se cachait une personne très sensible à la nature environnante. C’est donc le cœur lourd qu’elle laissa le petit chat seul sur la pile que formait ses trois valises, miaulant sa peine de se sentir abandonné.

    Lydi lui tira la manche tandis qu’elle regardait, la bouche grande ouverte, vers la locomotive en tête du train. Un homme gigantesque les attendait. Tout le monde connaissait Hagrid. Ce dernier, fidèle à Albus Dumbledore et grand ami du célèbre Harry Potter, avait une part importante dans l’Histoire de Poudlard. Grand homme – au sens figuré comme au sens propre du terme –, il fallait avouer qu’il était encore plus impressionnant en vrai que ce que laissait entendre les livres. Emily était assez fière de pouvoir remettre dans leur contexte tout ce qu’elle avait appris au cours de l’été. Bien qu’ayant découvert le monde des sorciers depuis peu, elle avait travaillé d’arrachepied pour essayer d’en savoir le plus possible et être prête pour cette rentrée. Cette nouvelle aventure était en quelque sorte leur dernière chance d’être un tant soit peu heureux, et elle voulait mettre toutes les chances de son côté et, par-dessus tout, ne pas décevoir Nathanaël. C’est ainsi qu’elle avait dévoré tous les livres qu’elle pouvait en ce court laps de temps et qu’elle s’était préparée. Cependant, lorsqu’Hagrid invita les premières années à le suivre, la jeune fille eut un moment d’hésitation. Devait-elle entrer en même temps que les autres ? Un semi-géant devait avoir une vue imprenable sur des humaines n’ayant pas encore atteint leur taille adulte, car il sembla l’avoir repéré à son air perdu.

    – Tu dois être Miss Jonson ? dit-il après s’être rapproché d’elle. Le professeur McGonagall m’a parlé de toi. Tu viens avec nous, tu passes en même temps que les autres.

    Il avait un petit sourire qui se voulait rassurant. Malheureusement, Emily sentait déjà les regards interrogateurs lui bruler la nuque. Ce moment amicale et joyeux qu’elle avait passé avec Lydi lui semblait désormais plus qu’en péril. Il était certain que la jeune fille ne lui pardonnerait pas de l’avoir ainsi dupée, et les autres non plus. Pourtant, cette dernière sembla être la seule à ne pas s’être formalisée de l’échange qu’il venait d’y avoir entre sa nouvelle amie et Hagrid. En effet, Lydi, bien que n’ayant rien dit, avait bien vu le malaise qui s’était affiché sur le visage d’Emily lorsqu’elle lui avait demandé en qu’elle année elle était. Elle était peut-être petite, mais il n’était pas très difficile de remarquer qu’Emily était bien trop grande et trop mâture pour être en première année. Les deux jeunes filles suivirent donc Hagrid lorsque tout le monde fut regroupé, afin de se diriger vers les barques qui les mèneraient à Poudlard.

    À quelques mètres de là, le jeune homme brun de la ménagerie magique ne les quittait pas des yeux, ayant repéré la chevelure roux-clair tant recherché. Il l’avait vu déposer la cage d’un chat sur une pile d’affaires et en avait souri bêtement, se disant qu’elle l’avait adopté un peu grâce à lui.

    – Alors tu viens ? lui dit son frère en lui donnant une tape sur l’épaule. Les dernières calèches vont bientôt partir.

    – Oui j’arrive.

  Il s'apprêta à lui emboiter le pas mais, alors que les divers effets des premières années étaient emportés, un petit éclat brillant tombant d’une des valises de la jolie rousse attira son attention. Il décida alors de récupérer l’objet pour le lui rendre plus tard et rejoignit son frère et leurs amis pour le début de la cérémonie, curieux de savoir quelle maison aurait la chance d’accueillir la nouvelle venue.


*


    La balade dans les barques fut féérique. L’attention de tous les premières années étaient happée par la magie des lieux. Arrivant par le lac, le château de Poudlard les surplombait de toute sa majestuosité, rendant le tableau encore plus impressionnant qu’il ne pouvait déjà l’être. Arrivés sur la rive, ils descendirent et suivirent Hagrid vers l’entrée de l’école. Il poursuivit sa route jusqu’à pénétrer dans l’immense bâtiment qui allait devenir pour l’année scolaire à venir, leur nouvelle école mais aussi leur nouvelle demeure. Ils montèrent les escaliers à la suite du géant, non sans crainte. Les escaliers étaient connus pour être capricieux mais, ce soir, ils semblèrent respecter la direction voulue par le garde-chasse et professeur de soin aux créatures magiques. Ils s’arrêtèrent enfin en haut d’un escalier où les attendait Neville Londubat. Ce dernier lança un sourire chaleureux à l’attention d’Emily tandis qu’Hagrid lui laissait le flambeau.

    – C’est ici que je vous laisse, leur dit Hagrid. Neville…Enfin, le professeur Londubat, va prendre la suite.

    – Je crois que je commence à me sentir mal, chuchota Emy, plus pour elle-même que pour réellement avoir une réponse.

    Cependant Lydi qui ne l’avait pas quitté depuis le voyage en train l’avait entendu et lui dit de sa petite voix d’enfant si réconfortante :

    – Ne t’inquiète pas, on ressent tous la même chose mais ça va aller. Ce n’est qu’un court moment à passer après tout.

    Emily lui rendit son sourire de manière un peu forcée. C’était plus compliqué que cela mais la petite Lydi, n’étant pas dans la confidence, ne pouvait pas s’en douter.

    Le professeur Londubat leur expliqua quelques règles de l’école, le système des points mais aussi que leur maison serait leur nouvelle famille. Emy sourit en repensant à ce que lui avait raconté Neville sur son discours. Celui de McGonagall l’avait tellement marqué lorsqu’il était lui-même entré à Poudlard – même s’il l’avait interrompu à cause de son crapaud – qu’il avait décidé de fortement s’en inspirer.

    – …bien que dans des maisons différentes, n’oubliez pas que vous êtes tous égaux, que même si vous n’appartenez pas à une maison, cela ne signifie pas que vous ne détenez pas de ses qualités en vous. Et enfin, rappelez-vous le règlement est le même pour tout le monde, qu’importe la noblesse de vos actes.

    Cette dernière phrase arracha aux nouveaux élèves un sourire entendu. Tous connaissaient son passé commun avec celui du célèbre Harry Potter.

    – Très bien ! C’est le grand moment ! Suivez-moi.

    Les élèves le suivirent jusque devant la porte de la Grande Salle. Celle-ci s’ouvrit et les élèves purent constater à quel point cette salle portait bien son nom. Emily sentit son estomac se nouer davantage en voyant le nombres d’élèves présents, assis chacun à la table correspondant à leur maison. Elle sentait sa bouche devenir sèche et ses mains moites.

    – Regarde le ciel !

    Lydi était toute émerveillée face au plafond magique. Elle avait encore plus l’air d’une enfant à cet instant et Emily sentit une petite pointe au cœur à l’idée que leur amitié naissante puisse prendre fin prématurément.

    Après avoir parcouru la salle qui avait semblé à Emily faire des kilomètres de long, le petit groupe s’arrêta aux pieds de l’estrade où étaient assis les professeurs. Le professeure McGonagall était installée derrière une sorte de pupitre dont le socle était surmonté d’un immense oiseau en bronze. Elle instaura le silence et fit signe à Neville qu’il pouvait commencer. Il monta quelques marches pour prendre le Choixpeau et déroula la liste des élèves.

   Commença alors la répartition. Chaque élève était appelé par ordre alphabétique et, lorsque le Choixpeau donnait son verdict, la table de la maison concernée accueillait le ou la nouvelle venue sous des tonnerres d’applaudissement. Jusqu’à présent, il y eu deux Serpentard – dont Lydi chuchota à l’oreille d’Emily être parmi les élèves qui s’étaient moqués d’elle dans le train. Ainsi ils savaient déjà où ils finiraient, se dit Emily. Deux Serdaigle, une Poufsouffle et une Gryffondor avaient suivi.

    – Regarde derrière nous, c’est Lily Potter, lui dit Lydi en chuchotant.

    Emily se retourna et aperçut une jeune fille aux cheveux roux un peu plus vifs que les siens. Elle ne s’attarda pas et se pencha à nouveau vers Lydi pour lui glisser à voix basse.

    – Elle ira forcément à Gryffondor.

    – Détrompe-toi, lui dit Lydi. Il parait que l’un des frères Potter est à Serpentard.

    Emily fit une petite grimace. Elle se demandait comment l’avait vécu le jeune homme. Son père avait-il été déçu ?

    – Emily Jonson !

    Le cœur d’Emily s’arrêta. Elle déglutit difficilement et quitta le groupe d’un pas mal assuré afin d’aller s’assoir sur le petit tabouret à côté du professeur Londubat. Encore une fois, il se voulut rassurant envers elle puis se tourna vers le professeur McGonagall. Bien que lui tournant désormais le dos, Emily savait déjà ce qu’il allait se passer. Elle aurait juste préféré qu’ils le fassent avant qu’elle ne soit assise face à tous, telle une sorcière attendant son jugement sur le bûcher. Ils avaient tous le regard posé sur elle et elle réalisa pleinement à cet instant que faire profil bas serait impossible.

    – Très chers élèves, commença le professeur McGonagall. Comme vous le savez tous, la cérémonie de répartition des maisons est un passage obligatoire pour chaque nouvel élève à Poudlard. L’élève, ainsi placé dans une maison, commence sa scolarité en première année. Cependant, une exception va avoir lieu cette année puisque notre école va intégrer une nouvelle élève, Miss Jonson, directement en troisième année compte tenu de son âge…

    Des murmures commencèrent à être échangés dans la grande salle devenant rapidement un brouhaha insupportable pour la jeune fille dont il était question. Son regard croisa celui de Lydi, compatissant. Elle chercha ailleurs espérant que ses plus grandes craintes étaient infondées mais ils étaient désormais tous occupés à faire des suppositions surement les plus farfelus les unes que les autres à son sujet. Tous, sauf un. Elle le repéra par le fait qu’elle l’avait déjà vu auparavant. Il la regardait en souriant, lui aussi semblant ne pas porter grande importance à ce saut de classes inexpliqué. Il était assis en bout de table, ce qui donnait une impression de léger retrait vis-à-vis des autres élèves. Elle réalisa alors qu’il était à la table des Serpentard.

    – Un peu de silence je vous prie !

    Le professeur McGonagall venait de se faire entendre d’une voix forte et raisonnante.

   – Bien qu’étant l’objet d’une telle exception, Miss Jonson sera une élève à la même enseigne que vous tous ici présent et suivra absolument le même règlement. Je vous prie donc de l’accueillir comme n’importe quel autre élève.

    Elle semblait avoir terminé car le professeur Londubat lui demanda en chuchotant :

    – Prête ?

    – Pas vraiment mais finissons-en, dit Emily en serrant des dents.

   Le professeur plaça le Choixpeau sur sa tête qui émit un hoquet surpris, la faisant elle-même sursauter. Tous étaient attentifs, impatient et redoutant à la fois ce que le Choixpeau allait dire. Cependant, il n’était pas encore prêt à donner une réponse. Emily l’entendit lui parler dans son esprit :

   – Je pourrais sans aucune difficulté t’envoyer à Gryffondor. Après tout, là serait ta juste place. Pourtant, je vois dans ton esprit que tu n’es pas sûre de vouloir y être.

    Emily avait repassé encore et encore son désir d’aller à Gryffondor dans son esprit. Intégrer cette maison dont les valeurs semblaient tant lui correspondre avait été son souhait tout l’été. Mais elle réalisait avec encore plus de force que cela allait attirer encore plus l’attention sur elle. Elle qui avait promis à Nathanaël de ne pas se faire remarquer. Elle qui aurait aimé passer inaperçue et faire une scolarité comme les autres élèves. Il lui semblait de plus en plus que c’était une mauvaise idée. Elle devait renoncer à cette maison si elle voulait essayer de réparer les pots cassés de ce soir.

    – Très bien je respecte ton choix. Hum… oui tu seras très bien à… POUFSOUFFLE !

    Les élèves de Poufsouffle l’applaudirent bien que certains le fissent avec peu d’enthousiasme. Elle alla s’assoir à la table et lança un petit sourire gêné à ses camarades. Ceux qui étaient à côté d’elle commencèrent à l’interroger mais, heureusement, McGonagall leurs rappela que la répartition n’était pas terminée. La cérémonie se poursuivit, la maison Poufsouffle voyant ses rangs s’agrandir au même titre que les autres maisons. Lily Potter, comme elle l’avait prédit, était entrée à Gryffondor avec fierté. Vint enfin le tour de Lydi qui était la dernière élève restante.

    – Lydia Wayatt !

    Un petit sourire se dessina sur les lèvres d'Emy en apprenant que Lydi lui avait donné le droit de l’appeler par son surnom. Cette dernière monta les marches et s’installa sur le tabouret. Elle était tellement petite que ses pieds ne touchaient pas le sol.

    – Il manquerait plus qu’on se coltine l’avorton, entendit dire Emily, un garçon de Poufsouffle à la peau mate, qui semblait avoir à peu près son âge.

    Emily fronça les sourcils mais ne dit rien, faisant comme si elle n’avait rien entendu alors qu’elle bouillait de l’intérieur.

    – Poufsouffle !

    Un large sourire se dessina sur les visages d’Emily et de Lydi, ravies de se retrouver dans la même maison. Emy frappa dans ses mains à s’en faire mal tellement elle était heureuse de retrouver sa nouvelle amie dans cette aventure. Cette dernière vint s’assoir à côté d’elle et les deux jeunes filles rirent ensemble, complices.



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06/06/2022

Les descendants - Chapitre 3

 


    – Mince alors ! Il était sacrément coriace ce type !

    – Coriace et effroyablement puissant.

    Emily et Nathanaël étaient installés à une table du Chaudron Baveur. Suite à l’invitation de Neville Londubat et de sa femme, ils avaient décidé de quitter leur hôtel près de l’aéroport pour loger au pub jusqu’à la rentrée. Emily aurait juré que l’établissement avait l’air plus sombre et peu fréquentable la première fois qu’ils y avaient posé les pieds. Aujourd’hui, il avait tout simplement l’air d’une de ces auberges que l’on rencontre dans les récits arthuriens. Ils étaient attablés, prenant leur petit-déjeuner, Emily lisant avec passion un livre d’Histoire du monde de la magie tandis que Nathanaël se maintenait au courant des dernières nouvelles via un journal dont les photos étaient animées. Emy découvrait chaque jour ce monde où dire que tout était plus vivant était un euphémisme. La magie semblait être en toute chose, si bien qu’elle n’aurait même plus été étonnée que la chaise ne lui demande de prendre ses aises. Elle avait momentanément stoppé sa lecture, distraite. Son regard se posa sur la gérante des lieux qui lui sourit tout en continuant d’essuyer les tables qui s’étaient vidées. Emily savait qu’il allait lui être étrange de voir Neville comme un professeur après avoir été dans son pub tout un été. Ce dernier avait laissé Hannah gérer seule l’établissement depuis quelques jours, retournant à Poudlard plus tôt pour préparer la venue des nouveaux élèves. La jeune adolescente avait appris que le professeur enseignait la botanique mais aussi qu’il était le directeur de la maison Gryffondor, succédant au professeure McGonagall qui ne pouvait plus tenir ce rôle par soucis d’équité envers les quatre maisons. Emily Jonson rêvait d’aller à Gryffondor. Sa baguette contenait, selon le vendeur, de la crinière de Lion mêlée à de la poudre de corne de Licorne. Elle avait été émerveillée, une fois encore, d’apprendre que ces créatures existaient réellement. Et le fait que sa baguette eût été fabriquée avec quelques poils du roi de la savane avait une signification toute particulière pour elle  signification qu’elle se gardera bien de taire pour le bien de tous.

    Au-delà du symbole, elle aimait les valeurs supportées par cette maison : leur courage, leur force. Les plus grands sorciers semblaient avoir été dans cette maison et elle espérait pouvoir y être à son tour. Elle ne pouvait néanmoins s’empêcher de penser que classer les élèves par catégorie était assez étrange lorsque l’on disait vouloir éviter que le passé ne se répète. Elle se demandait si les sorciers de Serpentard étaient vils et cruels dès le départ ou s’ils étaient formatés par ce que l’on pensait d’eux, par la réputation de leur maison. L’histoire du professeur Rogue n’avait pas manqué de la toucher. Il était la preuve qu’ils ne finissaient pas tous en fou assoiffés de pouvoir.

    Saphir sauta sur ses genoux et l’arracha à ses rêveries. Elle gratta la tête du chaton noir au poil brillant qui se mit à ronronner avant de se rouler en boule pour faire une sieste. Elle était tombée amoureuse du petit animal qu’elle avait repéré à la Ménagerie Magique. Il l’avait regardé de ses yeux bleus intenses et cela avait été comme une évidence. Ce serait lui, l’ami fidèle qui la suivrait dans cette nouvelle aventure. Sa maitresse repris sa lecture là où elle l’avait laissé. Elle devait absolument en savoir le plus possible avant son entrée à Poudlard. À défaut de savoir utiliser sa baguette – même le professeur Londubat n’avait pas réussi à lui faire comprendre pourquoi on passait par cet instrument pour lancer des sorts, ce qui valut comme résultat des échecs cuisants voir dangereux – elle pouvait au moins se rattraper sur d’autres matières et, surtout, ne pas avoir l’air d’être totalement ignorante au sujet du monde qu’elle venait d’intégrer. Elle s’était arrêtée à la grande bataille de Poudlard, celle qui avait marqué ce siècle et qui, on l’espérait, serait la dernière d’une telle gravité. Elle frissonna à l’idée qu’une telle personne ait pu exister. Aussi résistant que malfaisant, Voldemort avait très certainement été ce qu’il y avait de pire dans le monde de la magie, et Emy se voyait heureuse d’intégrer ce dernier après la disparition du mage noir.

 

*

 

    La rentrée fut vite arrivée et Emily Jonson vit son taux de stress multiplié par mille. Elle allait participer à la cérémonie de répartition des quatre maisons avec les premières années et elle appréhendait fortement tous les regards qui allaient se poser sur elle à l’annonce de son entrée directe dans la troisième. Hannah Abbot-Londubat lui avait expliqué comment se déroulait la grande soirée de rentrée et l’idée d’être assise sur un petit tabouret devant quatre immenses rangées de tables remplies de personnes ne l’avait pas particulièrement rassurée. Elle était désormais devant le Poudlard Express et sentait son estomac se tordre à l’idée de se retrouver avec tous ces gens qu’elle ne connaissait pas pour un trajet qui allait durer toute une après-midi. L’idée de faire marche-arrière commençait à poindre le bout de son nez dans son esprit.

       – Tu te souviens de ce que l’on a dit ?

    Elle essaya de se concentrer sur ce que son tuteur lui disait. Nathanaël revoyait avec elle les différents points à respecter pour une année, selon lui, sans accroc.

    – Je fais profile bas, je joue l’élève modèle mais pas trop, assez pour apporter des points à ma maison mais pas trop pour ne pas susciter de jalousie, je ne frappe personne, et je ne me mêle pas de ce qui ne me regarde pas. J’ai oublié quelque chose ?

    – Oui, dit-il avec son sourire chaleureux. Tu essayes de faire une scolarité normale et peut-être de te faire des amis pour une fois ?

    – Ça, ce n’est pas moi qui décide Nath’…

    – Je suis sûr que tu vas y arriver.

    – Tu as dit ça toutes les fois précédentes…

    – Cette fois c’est différent.

    En effet, c’était différent. Tout était différent. Ce monde était complètement à part. Elle venait de passer à travers un mur pour prendre un train qui l’emmènerait vers une école de magie. Elle allait apprendre à jeter des sorts et à fabriquer des potions pendant que cette idiote de Suzie Lucas continuerait de séduire tous les garçons du collège avec sa mini-jupe de pom-pom girl et que son frère de l’équipe de football menacerait les élèves timides pour qu’ils lui fassent ses exercices de math.

    Légèrement bousculée par les familles qui se pressaient sur le quai, Emily fut arrachée à ces souvenirs qui lui donnaient littéralement envie de vomir. Voir tout ce monde raviva dans sa mémoire l’image du jeune homme qu’elle avait bousculé à la Ménagerie Magique. Elle se demanda s’il prenait le train lui aussi mais n’eut pas le temps de regarder d’avantage aux alentours que le moment de monter à bord fut arrivé. Nathanaël la serra contre lui et lui demanda encore une fois, caché sous la capuche de son manteau :

    – Tu te souviens du plus important ?

    – Tu gardes un œil sur moi, lui dit-elle avec un sourire.

    Il se décala pour mieux la regarder en lui caressant les cheveux de ce geste paternel qu’il avait eu si souvent à son égard toutes ces années. Il était ce qui se rapprochait le plus d’un père pour elle et cette nouvelle aventure était quelque chose de nouveau pour tous les deux. L’émotion commençait à s’installer et ils décidèrent tous deux qu’il valait mieux qu’elle n’attende plus pour prendre son train. Après une dernière embrassade elle laissa donc Nathanaël sur le quai et monta dans le train, la cage de Saphir à la main.

    Elle chercha tant bien que mal un wagon vide afin d’éviter d’avoir à expliquer sa situation avant d’arriver à Poudlard. Elle préférait qu’ils soient sur le fait accompli et être plus ou moins protégée par la présence des professeurs dans le cas où cette exception qu’elle ne comprenait pas elle-même serait mal vue. Elle referma la porte du wagon derrière elle et libéra Saphir qui bondit sans attendre pour aller s’installer sur une des banquettes de tissu rouge. Emily s’assit à côté de lui et entreprit de terminer son livre sur l’Histoire de Poudlard. Bientôt, pourtant, elle fut dérangée par une petite tête blonde aux cheveux bouclés. La jeune fille semblait étonnamment jeune, même en admettant qu’elle soit en première année. Elle semblait hésitante ce qui poussa Emily à prendre les devants :

    – Est-ce que je peux faire quelque chose pour toi ?

    – Est-ce que je peux m’assoir ici ? Les autres n’arrêtent pas de m’embêter…

    Elle avait la voix d’une fillette à l’image de son physique. Des boucles blondes encadraient son visage enfantin et ses yeux marron clair pétillaient d’innocence. Bien qu’elle soit d’ordinaire assez solitaire, Emily ressentit instantanément de la sympathie pour cette jeune fille. Elle n’avait certes pas le même instinct que Nathanaël, mais il lui sembla qu’elle ne risquerait rien à faire le voyage avec elle.

    – Oui bien sûr, installe-toi, dit-elle avec un sourire rassurant. Comment tu t’appelles ? lui demanda-t-elle.

    – Lydi et toi ?

    – Emily. Tu es en première année ?

    Emy se surprenait à lui poser exactement le genre de questions qu’elle tenait elle-même à éviter. Elle ne savait pas pourquoi, cette petite – qui devait avoir tout juste deux ans de moins qu’elle – lui inspirait confiance.

    – Oui et toi ?

    – Hum… ça va être ma première année à Poudlard oui.

    Ce n’était pas un mensonge, elle n’avait jamais été à Poudlard. Elle n’avait pas envie de donner des raisons supplémentaires aux autres élèves de lui en vouloir. Ainsi elle faisait ce que son tuteur lui avait enseigné, elle s’appliquait à dire la vérité, même si celle-ci s’avérait incomplète. Lydi la regardait d’un air étrange, donnant l’impression qu’elle avait décelé que quelque chose n’allait pas dans sa réponse. Elle avait peut-être l’air jeune mais il était indéniable qu’elle était d’une extrême intelligence. Emily, qui commençait à se sentir mal à l’aise, nota dans un coin de son esprit de faire d’avantage attention et décida de changer de sujet.

    – Alors qu’est-ce qu’il se passe avec les autres ?

    – Ils se moquent de moi parce que je suis plus petite que tout le monde. Un des garçons de Serpentard m’a dit de retourner au jardin d’enfant.

    – Comment sais-tu que c’était des Serpentard ?

    – Certains avaient déjà leurs robes de sorciers. Le petit blason vert était cousu dessus.

    Elle fit une petite moue qui fit sourire Emily bien qu’elle la prenait tout à fait au sérieux.

    – Ne fait pas attention à eux. Les élèves de la maison où tu seras verront bien vite que tu es tout aussi forte et intelligente qu’eux.

    La fillette – bien qu’elle n’en soit pas vraiment une – lui lança un sourire radieux. Emily eut l’impression qu’elle ne s’en sortait pas si mal pour le moment.

    – Où est-ce que tu aimerais aller toi ? demanda Lydi.

    Emily hésita. Elle avait passé tout l’été à rêver d’aller à Gryffondor. Mais sur les derniers jours précédant cette rentrée, elle s’était demandée si cela était judicieux d’entrer dans la maison devenue la plus convoitée de l’école. Elle répondit néanmoins :

    – Je ne sais pas. Gryffondor a une superbe réputation mais je ne suis pas totalement fermée aux autres. De toutes façons, ce n’est pas nous qui choisissons, pas vrai ? Toi, tu as une préférence ?

    – Hum…oui. Tout sauf Serpentard ! dit-elle d’un air exagéré, avec une voix imitant le son grave de ce qu’Emily devina être celle du garçon qui s’était moquée d’elle un peu plus tôt.

    Les jeunes filles rirent ensemble. Bien que refusant de catégoriser les gens, Emily devait bien admettre que leur comportement vis-à-vis de Lydi ne jouait pas en leur faveur. Les gens bien à Serpentard se comptaient-ils sur les doigts d’une main ? Emily repensa à l’histoire de Lord Voldemort et un frisson la parcourut. Un puissant malaise l’habitait à nouveau, lui rappelant son mauvais pressentiment concernant son entrée à Poudlard. Ce terrible sorcier était certes définitivement vaincu, mais se pourrait-il que quelqu’un d’aussi malfaisant prenne la relève un jour ? Perdue dans ses pensées, elle finit par être ramenée à la réalité par Lydi.

    – Tu penses à Voldemort, pas vrai ? Tous ceux qui veulent éviter Serpentard y pensent. Ma mère n’ose toujours pas prononcer son nom après toutes ces années. C’est plus facile pour nous, nous n’étions pas nées.

    – Oui, c’est vrai…

    – Mais tu n’iras pas à Serpentard ! dit Lydi convaincue.

    – Comment le sais-tu ?

    – Tu es bien trop sympa.

    Emily sourit à nouveau. Il était vraiment rare que quelqu’un la trouve sympathique. C’était la deuxième fois qu’une personne lui adressait la parole pour autre chose que lui chercher des ennuis. Et ces deux fois s’étaient produit depuis qu’elle avait accepté d’intégrer le monde des sorciers. La dernière recommandation que lui avait fait Nathanaël lui revint à l’esprit : « fais-toi des amis pour une fois ». Il avait peut-être raison. Peut-être que cette fois ce serait différent ? Si cette école était si sûre que le laissait entendre la directrice et le professeur Londubat, peut-être qu’elle pourrait avoir une adolescence un peu plus normale, sans avoir à regarder par-dessus son épaule ? Les jeunes filles passèrent le reste du trajet dans la bonne humeur, et c’était dans un nouvel état d’esprit qu’Emily se rapprochait de l’école de Poudlard.



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